L’affaire pourrait bien donner des sueurs froides à plus d’un maire de l’Oise. Cet après-midi, le tribunal de grande instance de Beauvais doit en effet fixer la consignation de constitution de partie d’un dossier pas comme les autres. Il concerne une plainte déposée contre le premier magistrat de Monts — un village du Vexin — pour exécution de travaux non autorisés par un permis de construire, prise illégale d’intérêts et recel de prise illégale d’intérêts.
Parmi les plaignants : le ROSO (regroupement des organismes de sauvegarde de l’Oise) qui regroupe 85 associations locales.
Un projet immobilier au cœur de la polémique
Dans cet épineux dossier, les défenseurs de l’environnement accusent l’élu — agriculteur et gérant d’une société d’immobilier — d’être au cœur d’un conflit d’intérêts. Ils lui reprochent d’avoir fait ériger, au printemps 2011, treize poteaux électriques à la sortie de son village rural de 200 âmes. « Au départ, tout le monde s’interrogeait sur l’utilité de ces lampadaires qui n’éclairaient que les champs, résume un habitant de Monts. Et puis, au bout de quelques semaines, on a fini par comprendre… » Selon plusieurs associations, l’installation des becs de gaz cachait en réalité un projet immobilier, censé voir le jour sur des terrains appartenant… à Monsieur le maire. « Quand on a découvert ça, on a attaqué le plan local d’urbanisme devant le tribunal administratif d’Amiens mais nous avons été déboutés, rappelle Didier Malé, le président du ROSO. Nous avons fait appel et on a décidé d’aller plus loin en assignant le maire au tribunal correctionnel. C’est une première pour nous… »
L’association, qui milite pour une justice verte plus efficace, n’avait en effet jamais traduit d’élu au pénal. Mais les prétoires ne lui sont pas étrangers pour autant. Car depuis l’obtention de l’agrément préfectoral pour la protection de l’environnement, le ROSO use de son droit d’attaquer en justice et n’hésite pas à multiplier les actions. L’association a notamment pris l’habitude de s’asseoir sur le banc des parties civiles dans les procès visant des entreprises.
Comme en décembre 2012 quand la société Ecobois, reconnue coupable d’atteintes à l’environnement, avait été condamnée à 25 000 € d’amende. Ou un an plus tard, lorsque le tribunal correctionnel de Beauvais a jugé le gérant d’une casse auto de Méru poursuivi pour avoir pratiqué la dépollution de véhicules hors d’usage sans agrément préfectoral. Et ce sera encore le cas dans les semaines qui viennent, lorsque le TGI de Paris se penchera sur les activités de Minore, une société de dépollution soupçonnée d’avoir planifié l’enfouissement clandestin de plusieurs tonnes d’amiante à Bouconvillers et Persan (Val-d’Oise).
« Nous avons été soutenus dans toutes ces démarches par la politique active mise en place par le substitut général de la cour d’appel d’Amiens, souligne Didier Malé. Le parquet de Beauvais est lui aussi très sensible aux questions environnementales. » La preuve : ce dernier a récemment ordonné une enquête sur la destruction de 357 ha de blé, au printemps, sur huit communes de l’Oise. Cette fois, c’est le laboratoire Dow Agrosciences qui est en cause. Et là aussi, le Roso s’est constitué partie civile.